_ No 16 - printemps 2005 Print

C'est ... arrivé en Suisse

 

Langue de bois au feu

La langue la plus parlée dans le monde n'est sans doute pas l'anglais, c'est la langue de bois. Le langage de la noncommunication et du repli sur des schémas archaïques. Elle rend possible la contamination par le fascisme, le communisme, ou par tout autre logique qui donne une rationalité à l'irrationnel. Au nom de la liberté d'expression, on accepte les déclarations les plus incendiaires contre nos sociétés, notre liberté de penser, notre mécréance. Et ceux qui osent dénoncer cette dérive, qui osent pousser leur cri sont ostracisés. On crée une catégorie de nouveaux bien-pensants qui établissent un cordon sanitaire autour de ceux qui rejettent cette langue de bois. A contrario, une partie des médias n'est plus que le porte-parole de partis, de grandes entreprises et ou de groupes de pression. Ils se coulent dans le même moule, celui du ni oui ni non.

On éradique la certitude qui veut que pour faire vivre une démocratie, pour avoir une société libre et tolérante, il faut des personnes qui dérangent, qui n'acceptent pas les discours convenus. Des hommes qui refusent la phraséologie insipide et niaise des politiciens.

Le Conseil fédéral conscient qu'il fallait absolument se ressaisir vient de décréter que la langue de bois serait dorénavant interdite dans le monde politique. Enfin une sage décision qui réjouira le peuple, dans deux ou trois siècles si tout va bien! 

Halte à la misère

Dans un pays comme le nôtre, riche, puissant, disposant de centres de formation de haut niveau, il est évident que la misère est un problème politique. II ne relève ni des conséquences d'une guerre civile, ni de catastrophes climatiques, ni du sous-développement, mais de l'incapacité du pouvoir politique à faire en sorte que soit rempli le rôle social de l'Etat, pourtant rendu obligatoire par la Constitution. Depuis plusieurs années les associations caritatives confirment que la pauvreté augmente. Que fait le politique ? Rien, ou si: II continue à réduire tous azimuts dans les domaines sociaux. L'État augmente sans discontinuer les prélèvements de toutes sortes: impôts, amendes, taxes diverses. Où vont ces sommes gigantesques ? Une part importante de cette manne est consacrée au financement d'une administration lourde, amorphe, sans aucune originalité. Mais tout cela va changer. Sous la pression de quelques politiciens, les gouvernants ont décidé de réorienter leur politique et surtout de réfléchir un peu plus intelligemment. Allons, on peut toujours rêver!

Formation professionnelle

C'est arrivé, enfin soupireront certains, les métiers manuels font à nouveau l'objet d'une grande attention. Ces professions qui sont réservées aux moins que rien, aux pas trop ou pas du tout intelligents. Non, il s'agit d'un rêve car les professions des arts et métiers sont discréditées. Les exemples foisonnent de jeunes qui, lorsqu'ils doivent choisir un métier se voient presque rudoyer par certains orienteurs professionnels parce qu'ils veulent embrasser la profession de ramoneur, boucher, boulanger, menuisier et beaucoup d'autres. Dès qu'une jeune fille ou un jeune homme n'a pas trop de difficultés à l'école, il ou elle est orientée vers la filière études longues. Quand bien même cela leur déplaît on les y amène presque sous la contrainte. Et que constate-t-on ? Que la cohorte des jeunes universitaires sans travail augmente lentement mais inexorablement. Quand comprendra-t-on qu'il vaut mieux un excellent carreleur ou ébéniste, qu'un mauvais avocat ou un piètre ministre ? Alors encourageons les professions manuelles où la créativité a encore sa place.

André Sprenger, Journaliste