Le physicien du CERN travaille sur l'Internet de demain. Au CERN depuis trente-trois ans, il s'est plongé dans les machines lorsque le centre de recherche a commencé à traiter ses données informatiquement Cela va faire trente-trois ans que Chris Jones travaille au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), près de Genève. Un tiers de siècle dans la région - il vit à Crassier (VD) - qui n'a pas suffi à lui faire perdre son joli accent British. S'il admet être ici depuis trois décennies, ce père d'un grand fils refuse obstinément d'indiquer son âge: "Je ne le donne qu'à la police ou au Contrôle des habitants!" Ce n'est pas faute d'aimer les chiffres, pourtant. Surtout ceux, horriblement compliqués, que seuls les plus gros ordinateurs parviennent à débrouiller. D'où sa passion pour The Grid. La Grille, en français. La Grille? C'est un peu l'Internet de demain: un réseau d'ordinateurs disséminés dans le monde entier, chargés de traiter des monceaux de données. Chris Jones, qui travaille au Département des transferts de technologie, cherche à appliquer cette puissance de calcul à la vie quotidienne. "Imaginons un médecin qui doit établir un diagnostic. Il aura accès à une masse de données d'habitude gardées dans des tiroirs: des milliers de radios avec lesquelles il pourra comparer votre cas, par exemple." Quel rapport avec le CERN? Le centre européen aura grand besoin du partage des tâches informatiques dès 2007. A cette date, le LHC, un accélérateur de particules géant actuellement en construction, produira des quantités énormes de résultats, qu'il faudra trier, analyser, débroussailler. Impossible sans la Grille et sa phénoménale puissance de calcul. Avec, au bout, l'espoir de comprendre toujours mieux l'organisation de la matière. "Avec le LHC, il faudra sans doute revoir entièrement nos modèles", se réjouit Chris Jones, une lueur gourmande dans le regard. Une gourmandise et une curiosité qui l'ont amené à passer d'un domaine à l'autre. D'abord physicien à Oxford, il devient informaticien lorsque les données produites par le CERN commencent à être traitées informatiquement. Le voilà plongé dans les machines, qu'il ne quittera plus. Même lorsqu'il passera aux sciences de la vie, une passion plus récente. Le principe est un peu le même: s'aider d'ordinateurs pour analyser l'infiniment petit. Sauf que là, c'est encore plus compliqué. "Il s'y mêle des questions éthiques, la protection des données, le respect de la vie C'est passionnant, car il faut tout traiter en même temps!" Aimer les calculs compliqués, cela laisse bien peu de temps pour les loisirs "Je pratique quand même le golf." Le golf? Est-ce que ce ne serait pas un peu trop simple? L'arc lémanique, paradis scientifique Le CERN s'associe avec les cantons de Vaud et de Genève et l'EPFL, notamment, pour promouvoir le savoir technique et scientifique de la région lémanique. Un stand commun sera mis en place au salon Telecom 2003, qui ouvre ses portes dimanche. L'association Lake Geneva Region y présentera les recherches actuellement en cours, notamment la Grille, et cherchera à attirer dans notre pays les grands groupes étrangers actifs dans les nouvelles technologies. Frédérique Julliard, le Matin, le 07.10.2003 |
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