Le bois « rétifié »
Un procédé qui évite de traiter chimiquement le bois, qui rend ce matériau résistant à l'humidité comme aux moisissures... La rétification offre de multiples avantages tout en respectant au maximum l'environnement.
Le bois, un matériau écologique? Vraiment? L'imprégnation chimique du bois pour éviter les effets néfastes provoqués par l'humidité, les insectes et les moisissures soulève de plus en plus d'interrogations: les usines de traitement peuvent polluer les sols et l'incinération des bois traités reste problématique. En outre, l'importation d'essences réputées pour leur stabilité (wes¬tern red cedar, teck ou autres bois tropicaux) participe à une exploitation irréfléchie des ressources tropicales et à la déforestation.
Une solution existe pour éviter ces «externalités négatives» : la réti¬fication, un procédé reconnu au niveau international, qui valorise des essences très répandues en Europe (sapin, épicéa, pin maritime, hêtre, peuplier...) et qui évite les traitements chimiques.
Le site internet de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNU¬CED), qui inventorie un certain nombre de technologies afférentes aux produits agricoles, met ainsi en avant la rétification comme une avancée importante en matière de traitement du bois.
Décomposition chimique du bois sous l'action de la chaleur
La CNUCED nous apprend que le mot rétification est constitué de l'association de deux termes et de deux idées: réticulation - transformation d'un polymère (molécule) linéaire en polymère tridimensionnel par création de liaisons transversales - et torréfaction - début de calcination à feu nu que l'on fait subir à certaines matières organiques (pour éliminer un principe nuisible, provoquer la dessiccation, faire apparaître des essences aromatiques...).
Le procédé de rétification consiste donc à provoquer une décomposition chimique de certains composants du bois sous l'action de la seule chaleur (avec une température comprise entre 200 et 240°C). Les caractères physiques et chimiques du bois sont ainsi modifiés. Cette technique est applicable aux essences telles que le pin sylvestre, le pin maritime, le peuplier, l'épicéa, le hêtre, le frêne, le bouleau, le sapin et le châtaignier.
Résultat de la rétification? Le bois est moins hydrophile, la sensibilité aux agents biologiques de dégradation est réduite de manière substantielle, la durabilité du matériau est accrue et, enfin, l'environnement est davantage respecté.
Une école pionnière
L'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne est pionnière en matière de système de rétification. Son procédé est tout à fait particulier: il consiste à réaliser une pyrolyse ménagée en absence d'oxygène sans ajout d'aucun produit; l'exposition du bois à la chaleur entraîne une modification physico-chimique définitive des composants du bois, ce qui distingue cette technique d'un simple séchage. Cette modification profonde de la structure du bois altère les nutriments contenus par le bois, modifie son hydrophilie et sa stabilité dimensionnelle. Elle touche aussi ses performances mécaniques.
Dans la première phase du traitement, le bois va subir un séchage poussé jusqu'à 140°C. La deuxième phase du traitement, avec une chaleur comprise entre 150°C et 180°C, correspond à la transition vitreuse du matériau.
A ce stade, le bois n'est pas «modifié» et son état est réversible. Au delà de ce point, la réticulation des composants commence et les modifications du bois seront définitives. Les paramètres de teinte, de stabilité et enfin de durabilité du bois d'origine vont évoluer progressivement. Une des spécificités de la rétification est de travailler dans la plage de température de réticulation des constituants. Pour atteindre cette courte plage, spécifique à chaque essence, le bois est soumis à des températures pouvant atteindre 240°C.
La température propre de rétification, la durée d'exposition du bois à cette température ainsi que la nature de l'atmosphère et les différentes phases du cycle sont autant de facteurs conditionnant la qualité du traitement.
Des qualités comparables à celles des bois précieux
Une fois cette température de crête atteinte, les bois sont refroidis en atmosphère inerte. Ils reviennent progressivement à température ambiante, à laquelle ils garderont les propriétés de stabilité et de durabilité acquises à haute température.
Signalons que la faible «humidité» du bois rétifié rend non seulement ce dernier imputrescible, mais confère aux essences européennes une stabilité dimensionnelle comparable à celle de certains bois précieux. Les retraits volumiques des résineux ou du peuplier sont ainsi analogues à ceux du western red cedar ou du teck. Et d'espèce à fort retrait le hêtre rétifié devient un bois à retrait faible. La rétification donne une nouvelle couleur «caramel» aux bois traités, qui les rapproche encore plus des bois précieux.
Notons cependant que, si elle n'est pas rigoureusement menée, la chauffe du bois peut dégrader les propriétés mécaniques de certaines essences.
Les applications de la technique de rétification sont très variées et incluent aussi bien les bardages que les portes, les parquets ou les meubles. Le domaine des jeux pour enfants paraît aussi particulièrement intéressant.
Entreprise Romande, G. Tesnier, 12 janvier 2007
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