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Revue de presse / Echo Magazine
Les microcrédits secouent le capitalisme

Un changement de cap radical agite la finance internationale. Après être restés longtemps en marge du système, les microcrédits sont très ä la mode. Brève histoire d'une vraie révolution.

Le microcrédit est devenu tendance. Depuis deux ans, de nombreux établissements bancaires ont ajouté ce secteur à leur panoplie de services financiers. Car les pauvres sont beaucoup plus fiables que ce qu'on prétendait.

En octobre prochain, un sommet mondial de la microfinance se tiendra à Genève. Dans cette petite ville éminemment bancaire, une jeune société financière, Blueorchard, fondée en 2001, est devenue en quelques années un leader dans le domaine. Elle affiche une réussite insolente dans la levée de fonds en faveur d'IMF. Cet acronyme nouveau (pour instituts de microfinance) est l'un des signes du changement, pour ne pas dire de la révolution, en cours en faveur des petits prêts. Pourquoi un tel engouement?

La crise des subprime au Nord et celle, alimentaire, au Sud ont remis en question certaines certitudes de la finance internationale. Les maxiprofits ont perdu de leur cote au profit de placements moins rémunérés mais plus sûrs.

Et puis, l'éthique joue aussi un rôle: l'homme ne vit pas que de profit. C'est pourquoi, en Suisse, des épargnants retirent leurs billes de l'UBS pour les confier à la Caisse Raiffeisen. Même la Banque mondiale s'est mise à prêcher pour des investissements en direction des productions agricoles locales des pays pauvres au lieu de favoriser les produits d'exportation! Exactement le contraire de ce qu'elle a fait durant des décennies.

Enfin, l'attribution, en automne

2006, du Prix Nobel de la Paix à Muhammad Yunus a eu un impact considérable. En jetant un grand coup de projecteur sur sa Grameen Bank, fondée il y a une trentaine d'années, elle a montré au monde entier que les pauvres sont solvables. La formidable réussite, financière et sociale, de cette banque des pauvres a confondu les théories économiques des puissants de la finance: on peut faire crédit aux démunis, ils sont dignes de confiance. Nous racontons ci-après très succinctement la belle histoire de ce musulman bengali, qui s'est battu avec une opiniâtre volonté pour faire admettre que les pauvres ne doivent pas rester en marge de l'économie. Mais Yunus n'était pas seul...

Oikocredit, pionnier de la microfinance

A Genève, bien loin du Bangladesh mais précisément à l'époque des débuts de la Grameen Bank, des théologiens ont voulu croire eux aussi à la force des pauvres. En 1975, le COE (Conseil oecuménique des Eglises) lance Oikocredit. Enracinée dans "l'Evangile social" cette coopérative financière naît dans le but de fournir aux Eglises un outil d'investissement alternatif au service des pauvres. Avec Oikocredit, les Eglises s'engagent en faveur d'une société s'inscrivant "dans une logique de justice, de participation et de développement durable".

Pionnière du financement solidaire, notamment en faveur du développement, Oikocredit accueille des fonds en provenance d'institutions ecclésiales et de particuliers du Nord, qu'elle investit au Sud, essentiellement dans des projets de développement ruraux. Un rendement annuel de 2 % est prévu.

Les débuts sont difficiles. Le siège est établi à Amersfoot (Pays-Bas), parce que "les banquiers genevois n'en voulaient pas". Pour drainer des fonds, des associations de soutien sont créées dans différents pays. A Pully, le pasteur retraité Eugène Roy est responsable de l'association romande. "Dès le départ, explique-t-il, nous voulions apporter des possibilités de financement à ceux qui n'ont pas accès aux banques".

Les associations de soutien établissent des contrats de fiducie avec leurs membres (des particuliers ou des institutions). Elles transmettent les fonds recueillis à Oikocredit, qui les investit dans des IMF ou des coopératives, selon de rigoureux critères éthiques et sociaux. Parmi les bénéficiaires de prêts, on trouve aussi la Grameen Bank de Mohammad Yunus.

PAS SEULEMENT PRÊTER

La préoccupation sociale est fortement prise en compte par Oikocredit. Eugène Roy: "Nous voulons aller vers les plus pauvres, dans les campagnes, où les gens n'ont guère accès à des crédits. Mais nous devons aussi être attentifs à nos frais: il faut à peu près 250 clients pour assurer le salaire d'un employé local". Oikocredit collabore avec d'autres organisations, notamment du commerce équitable. Il vise à affecter 20% de son activité à ce domaine.

Les prêts commencent à petite échelle. "Nous avançons d'abord 100 ou 200 euros. Puis, selon l'évolution de la situation, nous prêtons plus. 80 % des bénéficiaires sont des femmes, que nous essayons de regrouper, car il ne s'agit pas seulement de prêter, mais de former aux bases d'une bonne gestion économique et de l'épargne. Nous avons toutes sortes de projets, parfois très petits. Par exemple, nous avons financé l'achat de plantons de pommes de terre par une Africaine!"

500 MEMBRES EN ROMANDIE

Au fil des ans, Oikocredit est devenu l'un des plus grands acteurs mondiaux de la microfinance, et peut-être la plus grande coopérative opérant au niveau international. Pionnière en matière de microfinance, elle a accumulé une expérience précieuse et finance plus de 400 IMF d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et d'Europe de l'Est.

Depuis deux ans, elle connaît une forte croissance: 16 % en 2007, avec 319 millions d'euros en gestion... et se trouve désormais confrontée à la concurrence! "C'est pourquoi nous devons absolument être bons, irréprochables sur le plan de l'éthique, et offrir une qualité de service impeccable!", commente le pasteur Roy.

Oikocredit fait la différence avec ses valeurs éthiques. En outre, sa structure coopérative donne un droit de vote à tous ses membres directs, quel que soit le nombre de parts sociales détenues. Autrement dit, ce sont les personnes qui prennent les décisions, pas le capital.

L'association suisse a passé le cap des 500 membres l'an passé et celui des dix millions investis, grâce à 500'000 francs levés en 2007. Les sommes placées vont de 1000 à 100'000 francs, ce plafond étant toutefois "assez rare", précise Eugène Roy.

Alain Dupraz – Echo Magazine – juin 2008

Oikocredit Suisse romande

150, rte de Ferney, CP 2100, 1211 Genève 2

www.oikocredit.org
suisse.as@oikocredit.org


C’est du Bangladesh, l'un des pays les plus pauvres du monde, que nous vient aujourd'hui une éclatante vérité: on peut prêter de l'argent à une personne démunie sans autre garantie que la confiance en elle. Parce qu'il a cru que la personne humaine (surtout quand il s'agit d'une femme) est digne de confiance, Mohammad Yunus, professeur d'économie, s'est vu attribuer le Prix Nobel de la Paix 2006.

IL REDONNE AU CAPITALISME, DONT IL EXTIRPE LA CUPIDITÉ, UNE LÉGITIMITÉ MORALE.

C'est par une famine que tout a commencé. Celle de 1974, qui précipita dans les villes du Bangladesh une foule aux ventres vides, véritables squelettes ambulants, où “on avait du mal à distinguer les morts des vivants“, dit Yunus. “Les vieillards avaient l'air d'enfants, les enfants ressemblaient à des vieillards“.

Après de brillantes études aux Etats-Unis, Mohammad Yunus est à l'époque un jeune professeur d'économie à l'Université de Jobra. A 34 ans, son statut lui confère prestige et bien-être. Mais il ne supporte pas la vue des morts vivants qui déambulent dans les rues: ils contredisent les belles théories économiques qu'il enseigne, lesquelles ne résistent pas à cette confrontation brutale avec la vie réelle.

Le professeur sort alors de son bureau pour étudier sur le terrain. Avec ses étudiants, il enquête sur les conditions de survie des démunis de Jobra, y découvre une situation d'esclavage. Sufia, 21 ans, fabrique un tabouret de bambou par jour. Elle emprunte le matériau le matin, rend l'objet fabriqué le soir, et reçoit le prix de sa journée: dix centimes, juste ce qu'il lui faut pour manger ce jour-là, elle et ses trois enfants. Il lui suffirait de disposer d'un franc pour acheter le bambou et revendre elle-même le tabouret. En maîtrisant le matériau, elle multiplierait son gain et pourrait développer son affaire, améliorer ses conditions de vie.

LE PAUVRE RETROUVE SA DIGINITÉ

La première enquête de Yunus et de ses étudiants est conclue: un montant de 27 dollars prêtés aux 42 familles du village leur permettrait de briser la servitude et de travailler pour leur propre compte. Le prêt est avancé: la Grameen Bank commence.

Longuement, lentement, avec ténacité, Yunus étudie, observe, essaie, affine. Il découvre que les petits crédits prêtés aux démunis les rendent créatifs. “Ennobli“ par la confiance qu'on lui accorde, le pauvre retrouve sa dignité et se fait un point d'honneur de rembourser.

Le prêt est aussi pour lui une occasion en or, qu'il n'entend pas galvauder, de briser sa condition d'esclave et de réaliser ses rêves d'homme libre.

UN CAPITALISME SANS CUPIDITÉ

Le “capitalisme populaire“ que Yunus met en place est fait de petites sommes pour de petites gens. Mais les pauvres sont nombreux, ils forment un vrai, un immense marché. La Grameen Bank brise aussi “l'apartheid financier“ qui frappe les pauvres, exclus des banques et de leurs crédits.

Elle anéantit l'une des règles de base des banquiers, ce que Yunus appelle “l'esclavage de la garantie“.

Parce qu'elles sont plus fiables, les femmes représentent la grosse majorité (94 %) des emprunteurs de la Grameen Bank.

En s'adressant à elles contre les usages et la pression sociale, Yunus bouleverse les mentalités. Lentement, sans brusquerie, mais avec ténacité, il met en place des habitudes nouvelles qui promeuvent la femme et améliorent son statut social. C'est peut-être là l'aspect le plus révolutionnaire des microcrédits de la Grameen Bank. Et le secret de sa réussite?

La Grameen Bank, c'est le nom d'une triple révolution: sociale, économique et financière.

Celle-ci n'est pas tribunaire du milieu socioculturel bengali. Aujourd’hui, Yunus a exporté le modèle, en l’adaptant, dans une centaine de pays. Ce faisant, il redonne une légitimité morale au capitalisme, dont il extirpe la cupidité. Trente ans après ses débuts, sa triple révolution a amélioré la vie de plus de 120 millions de pauvres. Cela vaut bien un Nobel.

A lire: Vers un monde sans pauvreté, Muhammad Yunus (Ed. Lattès).


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